Parallèles littéraires : Stendhal et Genet

Peut-être le seul point commun entre ces deux auteurs…

Stendhal, in La Chartreuse de Parme (1839) :

Au reste, tout ce qu’elle [la lettre de Clélia] lui apprenait ne lui fit pas un instant changer de dessein : en supposant que les périls qu’elle lui peignait fussent bien réels, était-ce trop que d’acheter, par quelques dangers du moment, le bonheur de la voir tous les jours ? Quelle vie mènerait-il quand il serait de nouveau réfugié à Bologne ou à Florence ? car, en se sauvant de la citadelle, il ne pouvait pas même espérer la permission de vivre à Parme. Et même, quand le prince changerait au point de le mettre en liberté (…), quelle vie mènerait-il à Parme, séparé de Clélia par toute la haine qui divisait les deux partis ? Une fois ou deux par mois, peut-être, le hasard les placerait dans les mêmes salons ; mais, même alors, quelle sorte de conversation pourrait-il avoir avec elle ? Comment retrouver cette intimité parfaite dont chaque jour maintenant il jouissait pendant plusieurs heures ? que serait la conversation de salon, comparée à celle qu’ils faisaient avec des alphabets ? Et quand je devrais acheter cette vie de délices et cette chance unique de bonheur par quelques petits dangers, où serait le mal ? Et ne serait-ce pas encore un bonheur que de trouver ainsi une faible occasion de lui donner une preuve de mon amour ?

(…)

Et c’était avec un profond sentiment de dégoût que, toutes les nuits, il répondait aux signaux de la petite lampe [moyen de communiquer avec sa tante la duchesse qui veut le faire évader]. La duchesse le crut tout à fait fou quand elle lut, sur le bulletin des signaux que Ludovic lui apportait tous les matins, ces mots étranges : je ne veux pas me sauver ; je veux mourir ici !

Jean Genet in Le Condamné à mort et autres poèmes, recueil dédié à Maurice Pilorge, jeune co-détenu dont il est amoureux (1942) :

Mes amis qui veillez pour me passer des cordes

Autour de la prison sur l’herbe endormez-vous.

De votre amitié même et de vous je m’en fous.

Je garde ce bonheur que les juges m’accordent.