La poésie du mercredi (#32)

Aujourd’hui, je vous propose un texte de Brassens, “Les Funérailles d’antan”, extrait de l’album du même nom sorti en 1960 !

LES FUNÉRAILLES D’ANTAN

Jadis les parents des morts vous mettaient dans le bain
De bonne grâce ils en faisaient profiter les copains
“Y a un mort à la maison si le cœur vous en dit
Venez le pleurer avec nous sur le coup de midi”

Mais les vivants aujourd’hui ne sont plus si généreux
Quand ils possèdent un mort ils le gardent pour eux
C’est la raison pour laquelle, depuis quelques années
Des tas d’enterrements vous passent sous le nez

Mais où sont les funérailles d’antan 
Les petits corbillards corbillards corbillards de nos grands-pères 
Qui suivaient la route en cahotant 
Les petits macchabées macchabées macchabées ronds et prospères
Quand les héritiers étaient contents 
Au fossoyeur aux croque-morts au curé aux chevaux même ils payaient un verre 
Elles sont révolues, elles ont fait leur temps
Les belles pon pon pon, pon pon pompes funèbres 
On ne les reverra plus, et c’est bien attristant 
Les belles pompes funèbres de nos vingt ans

Maintenant les corbillards à tombeau grand ouvert
Emportent les trépassés jusqu’au diable vauvert
Les malheureux n’ont même plus le plaisir enfantin
De voir leurs héritiers marron marcher dans le crottin

L’autre semaine des salauds à cent-quarante à l’heure
Vers un cimetière minable emportaient un des leurs
Quand, sur un arbre en bois dur ils se sont aplatis,
On s’aperçut que le mort avait fait des petits

Mais où sont les funérailles d’antan 
Les petits corbillards corbillards corbillards de nos grands-pères 
Qui suivaient la route en cahotant 
Les petits macchabées macchabées macchabées ronds et prospères
Quand les héritiers étaient contents 
Au fossoyeur aux croque-morts au curé aux chevaux même ils payaient un verre 
Elles sont révolues, elles ont fait leur temps
Les belles pon pon pon, pon pon pompes funèbres 
On ne les reverra plus, et c’est bien attristant 
Les belles pompes funèbres de nos vingt ans

Plutôt que d’avoir des obsèques manquant de fioritures
J’aimerais mieux tout compte fait me passer de sépulture
J’aimerais mieux mourir dans l’eau dans le feu n’importe où
Et même à la grande rigueur, ne pas mourir du tout

Oh que renaisse le temps des morts bouffis d’orgueil
L’époque des m’as-tu-vu-dans-mon-joli-cercueil
Où, quitte à tout dépenser jusqu’au dernier écu
Les gens avaient à cœur de mourir plus haut que leur cul

Mais où sont les funérailles d’antan 
Les petits corbillards corbillards corbillards de nos grands-pères 
Qui suivaient la route en cahotant 
Les petits macchabées macchabées macchabées ronds et prospères
Quand les héritiers étaient contents 
Au fossoyeur aux croque-morts au curé aux chevaux même ils payaient un verre 
Elles sont révolues, elles ont fait leur temps
Les belles pon pon pon, pon pon pompes funèbres 
On ne les reverra plus, et c’est bien attristant 
Les belles pompes funèbres de nos vingt ans